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Conférence publique sur le Droit à l’alimentation à Tillabéry

Situation alimentaire et nutritionnelle stable constatent les acteurs en présence

La salle de réunion de l’École normal Tanimoune de Tillabéry a servi de cadre, le 12 août 2017, à une conférence publique sur la situation alimentaire et nutritionnelle dans la région, initiée par l’Observatoire sur le Droit à l’alimentation. À cet effet, une mission conduite par le Secrétaire général de l’association Alternative espaces citoyens (AEC), Moussa Tchangari, a fait le déplacement de Tillabéry.

C’est dans cette perspective que, de prime abord, la parole a été donnée au Secrétaire général de la mairie de Tillabéry, représentant le maire, empêché, pour prononcé le mot de bienvenue à l’intention des visiteurs, mais également des nombreux invités qui, malgré leurs charges ont quand même fait le déplacement, répondant ainsi à l’invitation de la coordination régionale de l’Observatoire sur le Droit à l’alimentation de la région.

Après le mot du Secrétaire général de la mairie, ce fut au tour de Moussa Tchangari de prendre la parole pour, d’une part, remercier les participants à cette conférence mais surtout pour expliquer ce que c’est que le Droit à l’alimentation et surtout faire l’historique de l’Observatoire et justifier ses motivations.

Une fois toutes ces explications données par le Secrétaire général d’AEC, le point focal de l’Observatoire du Droit à l’alimentation de Tillabéry a pris la parole pour faire son exposé. Un exposé axé sur la campagne agricole 2016 et qui a relevé que sur les 2000 villages agricoles que compte la région, 772 sont déficitaires à plus de 50%. Soit 39% des villages pour une population estimée à 1 118 843 personnes.

Nonobstant ceci, ce dernier a expliqué que la situation alimentaire se caractérise par un bon approvisionnement des marchés en produits alimentaires mais malheureusement, les prix pratiqués sont en hausse par rapport à la même période de l’année précédente. Quoique, une amélioration de la situation nutritionnelle et alimentaire soit constatée cette année.

Du point de vue de la situation pastorale, celui-ci a indiqué que la santé animale est satisfaisante. Cependant, l’on constate sur les marchés une baisse des prix des animaux et des termes de l’échange défavorables aux éleveurs dans plusieurs départements. Ceci, sans compter une insécurité grandissante dans la partie Nord de la région qui plombe l’élevage.

En ce qui concerne l’assistance aux populations vulnérables, le bilan se présente comme suit : 7597 tonnes de céréales vendues à prix modéré ; 2850 tonnes de vivre distribués gratuitement à des populations cibles ; 343 tonnes de Food for Work ; 2,5 tonnes de Blanket Feeding ; 2736,5 tonnes d’aliments de bétail ; 961 812940 francs de cash for work et 504 000 000F de Cash Transfer. Tout ceci, sans compter les nombreuses actions de réponse de l’Etat et de ses partenaires.

Prenant enfin la parole à son tour, le Secrétaire permanent du Comité régional de prévention et de gestion des catastrophes et des crises alimentaires (PGCCA), M. Salifou Mamoudou, a également fait un rappel de la situation alimentaire, pastorale et nutritionnelle.

Confirmant point par point les chiffres donnés par le coordonnateur de l’Observatoire dans la région de Tillabéry, celui-ci a juste précisé que la campagne d’hivernage 2016 a effectivement connu un démarrage précoce sur l’ensemble de la région, comparée à celle de l’année précédente et que les productions céréalières enregistrées ont été bonnes à moyennes au niveau de 9 départements et médiocres dans 4 départements en l’occurrence, les départements de Filingué, Ayorou, Bankilaré et Tillabéry.

Avec force renfort de tableaux, Salifou Mamoudou a détaillé les prix des céréales (mil, sorgho, maïs et riz) dans la 2ème décade de juillet 2017, comparativement à la 2ème décade de juillet 2016 avant de procéder à une comparaison des prix des animaux, toutes catégories confondues toujours pendant la même période, confirmant de fait la baisse des prix de toutes les espèces. Une baisse qui, selon lui, s’explique notamment par la demande, jusque là négligeable, le faible taux d’échange de la Naira (monnaie nigériane).

Par rapport à la situation nutritionnelle, Salifou Mamoudou a indiqué que le nombre de cas dépistés de malnutrition modérée et sévère est nettement inférieur à celui de 2016 pour la même période. Ce qui dénote selon lui, d’une amélioration de la situation.

À l’issue de sa communication, le Secrétaire permanent du Comité régional de prévention et de gestion des catastrophes et des crises alimentaires a relevé un certain nombre de difficultés qu’il va falloir surmonter avant d’émettre quelques recommandations.

En l’occurrence, il a déploré la mauvaise perception des chefs coutumiers sur le fait que la distribution gratuite de céréales ne soit pas généralisée à toutes les communes, de même que la mauvaise perception du ciblage des bénéficiaires de cette distribution gratuite dans un même village. Le mauvaise état des routes permettant d’accéder à certaines localités a également été déplorée car, rendant difficile l’exécution de la distribution des vivres pendant l’hivernage, de même que l’insécurité grandissante dans toute la bande Nord de la région.

Toujours est-il, selon ce dernier, que, « le déclenchement à temps du Plan de soutien et le respect des différentes programmations des actions à la soudure, par les partenaires dans la région, ont permis d’apporter des réponses précoces ayant fortement contribué à stabiliser la situation alimentaire, nutritionnelle et pastorale ».

Après avoir attentivement écouté les différents intervenants, les participants à cette conférence ont finalement pris la parole. En gros, on peut noter qu’il y a eu plus de témoignages et de recommandations que de questions.

Ainsi, la première chose déplorée par la majorité des intervenants, ce sont les énormes irrégularités constatées à l’occasion de la distribution gratuite des céréales et de la vente à prix modérés de vivre. Des vivres qui, de l’avis de tous, ne parviennent véritablement pas aux destinataires.

D’où la forte recommandation à l’intention du gouvernement, de mettre en place un mécanisme de ciblage des personnes véritablement nécessiteuses. Ceci pour éviter les fraudes en la matière et éviter que les vivres ne tombent entre les mains de personnes qui ne devraient, en principe, pas en bénéficier. Cette recommandation est assortie d’une autre, n’en moins importante, afin de créer les conditions de suivie des activités de distributions de vivre en vue de mettre fin aux fraudes, tout veillant à la qualité des produits qui sont distribués aux populations.

Pour ce faire, l’un des participants a même recommandé la création d’un numéro vert. Seule garantie, selon lui, pour les populations de dénoncer tout manquement dans la distribution des vivres.

Le cas des femmes œuvrant dans la réalisation de demi-lunes, dans le cadre du Cash for work ou « travail contre argent » qui, de l’avis des participantes, surtout, sont exploitées. À la limite scandalisée, l’une d’elle explique que ces dernières réalisent les demi-lunes à raison de 3 à 1000 Fcfa. « Si ce n’est pas de l’exploitation, qu’est ce que c’est ! », s’indigne cette dernière. D’où l’appel à revoir le cas de ces femmes en leur attribuant une rémunération plus juste.

Deux cas typiques de violations du droit à l’alimentation ont également été relevés par les intervenants. En l’occurrence, dans le village de Bata, dans la localité d’Ayorou où, une décision de justice dépossède les populations de leurs terres agricoles, selon les intervenants. Il y a également le cas de ces 24 personnes interpelées, toujours à Ayorou, pour avoir tué des hippopotames qui saccageaient leurs cultures.

Ces cas sont également à revoir selon les participants car, ils ne faisaient que défendre leur droit à l’alimentation.

En guise de conclusion, Moussa Tchangari a repris la parole pour, d’une part saluer l’intérêt porté par les participants à la question du droit à l’alimentation, mais surtout appeler les uns et les autres à rejoindre le dispositif de l’Observatoire du droit à l’alimentation et à investir le terrain afin de contrer, autant que faire ce peut, les pratiques décriées lors des distributions gratuites et ciblées de vivres.

Selon lui, l’Observatoire n’est nullement fermé. Notre souhait, a-t-il conclu, « c’est que toutes les organisations qui ont intérêt dans le droit à l’alimentation puissent y adhérer ».

                                                                                                                     Seydou Assane

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